arrivée de Jusoor,

Jusoor, avait fait un petit tour en taverne, avec l'espoir de retrouver Cle et Mari. Quelle belle surprise ! Elle était heureuse d'être là, avec des amis chers. Elle allait enfin pouvoir guérir de cette frustration qu'elle avait eu la dernière fois de ne pas pouvoir rester plus longtemps près d'eux.
Au cours de la soirée, ils l'avaient gentiment invitée à venir prendre du repos dans leur si jolie maison. Evidemment elle avait acceptée. Ainsi, à la fin de la soirée, elle avait suivi le gentil couple d'amoureux jusqu'au domaine.

Enchantée, voire presque gênée de voir se dessiner devant elle une si jolie maison, elle leur sourit pour se donner du courage. Ju était en effet bien plus habituée aux granges ou aux fossés...
Cle lui dit alors qu'il avait préparé la chambre qui l'accueillerait. Elle lui sourit, exprimant ainsi une profonde gratitude.

Ils y étaient, sur le perron. Cle ouvrit la porte et un rectangle de lumière envahit les ténèbres qui les entouraient. Ju se sentit rassurée. Cle la poussa gentiment à l'intérieur, à la suite de Mari. Elle eut d'ailleurs un peu de mal à passer la porte, gênée par sa grande besace qui s'était mise en travers.

"Rhooooooooo, m'énerves toi !" s'emballa-t'elle à l'encontre de ce grand sac, pourtant si utile.

Ju releva alors les yeux et ne vit que beauté autour d'elle, elle en restait sans voix.

"Euhhhhhh...", un sourire flotta sur ses lèvres et bientôt un rire se répercuta sur les murs.

"Je peux savoir pourquoi vous passez autant de temps en taverne avec une si jolie maison ?"

Puis Ju s'interrogea : une si grande maison...

"Mais au fait, quelle heure est-il ? Les enfants seraient-ils déja au lit ? Arf ! Certainement, il est bien tard... Bon ben j'ai hate que le jour se lève pour en faire enfin la connaissance...n'est-ce pas ?...
Bon ben puisqu'il est si tard, et que nous sommes tous épuisés, quelqu'un peut m'accompagner à la chambre ?"

Et Ju partit d'un rire, dans l'attente de savoir qui l'accompagnerait car sa besace finissait par peser...

Jusoor remercia Cle du regard quand il s'empara de sa sacoche envahissante. Elle le suivit docilement dans les escaliers en l'écoutant parler. Elle essayait de ne pas se sentir perdue au milieu de cette grande maison. Elle avait l'esprit fatigué par les derniers évènements et essaya, aussi bien qu'elle le put de graver dans sa mémoire toutes les nouvelles informations que Cle distillait :

"Alors, ici à gauche c'est la salle d'eau, euh, la chambre de la nounou doit être par ici aussi et ... Qui est Arthur ?" se demanda-t'elle. Elle n'eut pas le temps de faire répéter à Cle car il s'était arrêté devant une porte qu'il ouvra en lui notifiant qu'elle dormirait là.

"Ouf... celle-là je vais m'en rappeler..."
Ju resta sans voix quand elle y pénétra à son tour.

"haaaaaaaaaaaan, c'est splendide.... Cle... c'est bien trop...je,...je ne suis pas une princesse tu sais...", et sur ce tout son sang monta à ses joues qui devinrent écarlates.
Elle se sentit encore plus gênée quand elle le vit travailler l'âtre pour l'activer un peu.

Elle esquissa un sourire timide car elle ne savait plus comment faire pour le remercier de sa générosité. Elle l'embrassa avec tendresse quand il vint lui souhaiter la bonne nuit.

"Bonne nuit à vous deux... et merci encore."

La porte refermée, elle se tourna vers la chambre qu'elle allait occuper momentanément. Elle porta les mains à ses joues brûlantes. Elle entreprit d'évoluer à l'intérieur de ce bijou de chambre en prenant garde à ne rien toucher pour ne pas faire de casse.
Une atmosphère de calme et de sérénité émanait de cet endroit. Tout y invitait à un repos serein : de jolis objets, une belle chaise tapissée de blanc, des rideaux légers et fins tout aussi clairs, un lit majestueux, oserait-elle seulement se glisser à l'intérieur ? Des draps doux et le moelleux des couverures. Une douce chaleur et des crépitements s'échappèrent de la cheminée, qui la ramenèrent à la réalité et lui firent prendre conscience de sa fatigue.

"Oui, Cle a raison, je dois me reposer."

Elle entreprit alors de se dévêtir, plia correctement ses habits comme à son habitude, les posa au sol pour ne pas salir la chaise, et prenant une grande respiration, se décida à entrer dans le lit. Elle dégagea les draps qui étaient bordés et se glissa à l'intérieur. Une immédiate chaleur la recouvrit et la douceur des draps, le confort et la fatigue firent le reste. Elle s'était endormie.

"J'ai toujours soif, mais on dirait pas assez pour toi, et.." Kannaquetil trébucha sur la dernière marche et se retînt au bras de Jusoor.

Il lui sourit, la remerciant silencieusement, attarda quelques longs instants son regard sur elle, avant de le porter sur le couloir et les chambres. Il ouvrit la bouche en voyant toutes ces portes, cette lumière, le soin apporté à la décoration, la propreté des lieux. Il pensa à sa propre maison, son carré de terre battue, son feu au milieu, sa paillasse à côté et ses outils dans un coin; plus qu'il n'avait jamais eu et dont il n'aurait jamais besoin. Mais comment pouvait on vivre ici? entretenir? et pourquoi? Des questions qu'il ne s'était jamais posé, n'ayant jamais pénétré dans un tel bâtiment. Il voyait des vides superflus où se trouvaient les chambres, des barrières en place de cloisons, des obstacles au lieu de portes, et l'étage entier lui semblait couper la maison, brisant l'harmonie. Il avait vu des palais, des forts, des demeures bourgeoises où vivaient des armées de serviteurs. mais il ne voyait pas l'usage d'une construction si grande et si complexe pour une seule famille.

Il se tourna vers Jusoor, remarquant qu'il lui serrait toujours le bras, peut-être un peu fortement. Il desserra la main et la fit glisser pour rejoindre la sienne.

"C'est..." Il ne trouvait pas ses mots : Beau, grand, perturbant, étranger, riche, soigné, confortable, effrayant...

"C'est chouette ici", finit il par dire en s'efforçant de sourire. Puis le sourire devint rire, masquant par la bêtise de sa remarque le mélange d'admiration et d'appréhension que lui soufflait son cœur.

Ju sentit la main de Kan glisser le long de son bras jusqu'à trouver la sienne, qu'il serra. Elle vit aussi son regard, tourné vers le palier, stupéfait, ou émerveillé, ou encore déstabilisé, elle ne savait quoi y lire. Peut-être un souvenir de ce qu'elle avait ressenti elle aussi en venant ici la première fois ?...

Citation :

"C'est...", "C'est chouette ici"

Ju lui sourit, devinant confusément ses pensées. Elle décida de ne pas amplifier le sentiment de gêne et l'entraîna sans attendre dans le couloir en riant. Quelques pas plus loin, elle fit volte-face, lui sourit et ouvrit sans délicatesse une porte. Elle pénétra sans l'attendre dans la chambre baignée de lumière qu'elle avait déja occupée. Bras levés et écartés à hauteur d'épaules, elle fit tournoyer ses dentelles, un sourire aux lèvres et s'effondra sur le lit moelleux. Elle nota les attentions de son frère, le bouquet de fleurs, le broc d'eau... Elle tourna alors son regard enjoué de gamine vers son ami et l'interrogea :

N'est ce pas une chambre digne d'une duchesse Kan ?

Kan était déja tout près de la porte quand Ju porta une main à la fleur prise dans ses mèches. Tout en maudissant ses joues qui la trahissaient à nouveau, elle osa un sourire à son ami.

"Hu Hum... Tu as raison... faisons leur honneur, j'ai hâte de les retrouver." Ju se releva et attrapa sa besace, échouée au milieu de la chambre.

"Ta chambre doit être contigüe à la mienne, d'après ce qu'a dit Cle. Je me rafraîchis, et je viens t'y chercher, d'accord ?"

Ju s'approcha à pas feutrés et poussa gentiment Kan dehors. Dans le couloir il ne put plus voir qu'un oeil espiègle et son sourire en coin par l'entrebaillement de la porte.

"Quant à la robe... tu verras bien !" Ju ferma la porte sans bruit et éclata de rire.

Ju était longue... n'était-ce pas naturel pour une femme ? Mais elle ne voyait pas le temps passer. Ces moments n'étaient qu'à elle et les minutes comptaient peu alors. Elle s'était rafraîchie, lavé le visage et les mains. Puis elle s'était habillée et devant le psyché avait, tant bien que mal, replacé ses mèches indociles en prenant garde à ne pas retirer la fleur. Son reflet lui sourit, cette robe était vraiment jolie... Elle était fière. Elle traversa la chambre pour aller chercher Kan qui, si elle était coquette, lui ne devait pas en être moins, car elle ne l'avait toujours pas entendu cogner à sa porte. Un dernier regard vers le psyché et elle ouvrit la porte. Elle s'arrêta, visiblement surprise, avant de trébucher sur l'obstacle.

"Ben alors ??? Mais qu'est-ce que tu fais là ?" s'exclama-t'elle en baissant les yeux sur Kan. Son regard fut vite attiré par une mare qui stagnait aux côtés de son ami, et la jolie robe, oubliée.

"Haaaaaaaaaaaaan !!!! Mais il y a eu un déluge ici ????" Elle le regarda, cherchant une explication.

Kan avait attendu un moment, assis par terre, se demandant à quoi pouvait ressembler Ju en robe. Il avait terriblement envie de la taquiner encore à ce sujet, et se concentrait pour écarter de son esprit toute réplique qui pourrait lui venir comme "on dirait une vraie femme!" ou encore "on te reconnaît pas", ou même un simple "ça te change!".
N'importe quelle phrase pouvant écorcher sa susceptibilité, il n'avait pas fini de faire le tour des remarques désobligeantes quand il entendit la porte s'ouvrir.
Il se tourna vers elle, mais ce qu'il vit lui vida l'esprit : C'était ju, toujours ju, tout simplement belle comme à son habitude, c'est à peine s'il vit la robe tant celle qui la portait le ravissait. Il resta un instant immobile, les yeux rivés sur elle, ne prêtant aucune attention à son exclamation, pas plus qu'à l'eau par terre, aux bruits du vent qui s'engouffrait dans le couloir ou au mélodieux écoulement du temps. Et, se levant sans détacher son regard, dit simplement, souriant :

"... ravissante... elle te va bien." Il lui prit la main et l'invita à se tourner, la fixant...

puis il l'entraîna vers les escaliers pour rejoindre les autres au jardin.

Et là, le temps reprit son cours, les phrases lancés par Ju atteignirent son esprit alors que les voix des maîtres de maison le rappelaient à la réalité.

"Ah.. oui, j'ai laissé mes affaires là, parce que je savais pas dans quelle... euh... con...ti...guui..ité était la chambre, on verra plus tard..."